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Blog Identités 28 mars 2021
Temps de lecture : 4 mn

Les tribulations de la Comic Sans MS dans le monde du graphisme

L'histoire de la police Comic Sans MS démarre dans les années 90 alors que l’informatique commence à équiper les ménages. Depuis, cette typographie est partagée entre popularité et haine. Mais que s’est-il passé pour qu’une police suscite autant de passions ?

L’étonnante histoire de la Comic Sans MS

L’histoire de la Comic Sans MS débute avec un chien

Vincent Connare, typographe chez Microsoft, travaillait sur un programme pour aider les enfants qui découvrent l’informatique, appelé Microsoft Bob, une sorte d’ancêtre de Siri. Microsoft Bob a un personnage, le chien Rover.
Rover est là pour aider les enfants et communique avec eux via des bulles de texte. Sauf que le texte utilise la police Times New Roman, un peu trop stricte au goût du typographe.

Les comics américains comme source d’inspiration

Il a alors l’idée de créer une police tirée des bandes dessinées de super-héros, D’où son nom, comic, comme « comic book », « bande dessinée » en anglais. La particule « Sans » souligne l’absence des empattements et le « MS » désigne son propriétaire : Microsoft.
Il s’inspire des comics Watchmen et Dark Knight Returns et dessine une typographie avec sa souris en effaçant au fur et à mesure ce qui ne va pas.

Malheureusement pour lui, sa police ne sera pas prête pour être intégrée dans le programme Bob. Sauf qu’elle rencontre un certain succès auprès des employés de Microsoft qui l’utilisent pour leurs e-mails en interne. Notamment les jeunes femmes qui en abusent pour lancer des invitations à des anniversaires ou autres événements festifs car le but de Comic Sans MS est de tout rendre drôle.

Si Comic Sans MS n’est pas intégrée à Microsoft Bob, elle est finalement présente dans Windows 95 où elle commence à gagner en popularité. Les gens commencent à l’adopter en masse et l’insèrent dans leurs « créations » graphiques faites maison. Tracts, publicités, e-mails, menus de restaurant, etc. : en quelques années, la Comic Sans MS envahit tout notre espace visuel. Et c’est là que les ennuis commencent.

Graphistes et internautes se mobilisent pour sa suppression

Tandis que des milliers de personnes utilisent la Comic Sans MS pour la création de leurs menus, affiches, carte de voeux, logos, documents administratifs ou encore leurs corps des e-mails, les graphistes commencent à développer une véritable haine envers cette typographie.

Disgracieuse, irrégulière, inachevée et puérile : elle n’évoque rien de positif aux yeux des graphistes. L’utilisation de cette police est considérée comme une faute de goût à la limite de l’amateurisme. Certains expliquent que son utilisation décrédibilise le texte.

Des voix s’élèvent pour arrêter l’expansion frénétique de cette police. En 1999, un mouvement signé par des milliers d’internautes demande son éradication pure et simple. Aux États-Unis, le mouvement « Bannissez Comic Sans » vise l’interdiction, tandis que « Comic Sans Criminal » veut nous aider à nous débarrasser de cette horreur. Rien de moins.
Son créateur est pointé du doigt et se défend comme il peut, allant même jusqu’à publier un manifeste de 40 pages pour défendre son « œuvre ».

En 2012, le CERN, l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire, en fait aussi les frais lors de la présentation du boson de Higgs. Le prestigieux laboratoire scientifique essuie de nombreuses réactions de la part des internautes après avoir utilisé cette police pour annoncer cette découverte scientifique majeure.

Le logo de la région Grand Est en Comic Sans MS

L’une des 50 pires inventions de tous les temps selon le magazine Time

En 2010, Time Magazine inclut Microsoft Bob dans une liste des 50 pires inventions. L’article reproche au logiciel notamment d’avoir introduit Comic Sans MS et la qualifie de la pire police de caractères de tous les temps.

Mais que reproche le magazine à cette police ? En résumé, le décalage entre son utilisation à outrance et son graphisme enfantin et pas très sérieux. La Comic Sans MS n’a également pas de caractère spécifique pour l’italique ou le gras. Son dessin présente aussi des espaces irréguliers et des courbes exagérées. Car cette police qui cherche à reproduire un texte manuscrit souffre d’un très gros défaut, son irrégularité visuelle.

Mais c’est surtout parce que cette police été employée n’importe comment et pour n’importe quoi. Elle a été utilisée partout, pour tout et souvent de manière inappropriée : devantures de magasins, e-mails, signalétique, marquage sur véhicules, livres ou documents en tout genre.

Le logo de la ville de Mulhouse en Comic Sans MS

La Comic Sans MS : entre popularité et haine

La Comic Sans MS est aux yeux du grand public, une police fantaisie, un peu plus sympa, originale, mais en fait elle devrait s’en tenir à son usage de base et non figurer sur des éléments professionnels.

Aux yeux des professionnels de la communication, utiliser la Comic Sans MS revient à dire « j’ai fait un logo sous WordArt » ou encore « j’ai fait un super dessin sous Paint ». Devenue d’une banalité affligeante, ne possédant pas de personnalité susceptible de faire passer ou d’incarner une marque ou un message, elle est aujourd’hui la risée des graphistes du monde entier.

L’identité d’une entreprise passe par le choix de la typographie parfaite

La police d’écriture fait partie des choix les plus importants qui doit permettre de créer le lien entre votre public cible et votre entreprise. Une mauvaise typographie aura pour effet de rebuter votre clientèle plutôt que de l’attirer.

S’il existe un très grand nombre de polices de caractères, elles présentent toutes de très nettes différences entre elles. Les meilleures typographies ont certains points communs, et notamment :

  • Un crénage régulier : l’espace entre chaque caractère est ainsi toujours le même
  • Une parfaite régularité : toutes les lettres, chiffres et caractères composant la police présentent la même apparence
  • Un bon équilibre : les pleins et les déliés sont alliés de manière harmonieuse
  • Une lisibilité idéale : la police est parfaitement lisible, quel que soit le support